Fracture numérique & génération Y

La Fracture numérique, ça en est où ?

Qu’appelle-t-on génération Y ?

On commence même à parler de génération Z…


Dès l’aube du 21ème siècle, le numérique a marqué une profonde césure dans le mode de vie des Français. Arrivé très vite, « sans prévenir » pour la plupart des non afficionados des nouvelles technologies (c’est-à-dire la majeure partie de la population), le dématérialisé a bouleversé le fonctionnement de la société en à peine plus d’une décennie. Initialement présenté comme outil de démocratisation et d’accès illimité à l’information et à la culture, Internet a, en parallèle, rapidement accentué certaines inégalités socio-culturelles.

Face à la dématérialisation des supports papier, aux formulaires administratifs informatisés, aux pétitions en ligne, à la progressive disparition de la lettre au profit du mail ou à l’utilisation de plus en plus généralisée des réseaux sociaux dans le monde du travail : quid des personnes âgées, des populations rurales, des sans domicile fixe ? Une large partie de la population tire effectivement de nombreux bénéfices d’Internet, mais un petit pourcentage demeure très éloigné de ces outils inédits, d’ores et déjà devenus la norme.

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Sommaire de l’article :

Le terme de « fracture numérique » désigne les disparités d’accès et/ou d’utilisation des nouvelles technologies liées au dématérialisé. Par extension, il peut également s’agir du fossé culturel s’étant ouvert entre les générations Y et Z et leurs aînés : lesdits Y et Z étant considérés en tant qu' »enfants du numérique » (nés dans les années 90 ou 2000, ils ont grandi manettes et smartphones en main), les générations précédentes en tant qu' »immigrés du numérique » (leurs parents ou grands-parents des Y ayant vu arriver le numérique au cours de leurs vies d’adultes).

Aujourd’hui, la quasi totalité de la population française a accès à Internet, chez soi ou sur son lieu de travail. En décembre 2013, le CREDOC (Centre de Recherche pour l’Étude et l’Observation des Conditions de vie) publiait une étude sur la connectivité en France : 77% des ménages avaient une connexion Internet à domicile ; la moyenne pour l’Union Européenne étant de 68%. Politiques et commerciaux s’allient alors pour faire reculer les « zones blanches », ces lieux isolés qu’Internet ne couvre pas, et en 2014 l’Inria  (Institut National de Recherche en Informatique et Automatique) affirmait que les foyers sans connexion n’étaient plus que 19%, soit 5,4 millions de ménages.

Le rapport de l’Inria permet également de catégoriser les français en 4 types précis de comportement face au numérique :

  • Les déconnectés (20%) : aucune perception des avancées numériques et de leur impact sur leurs vies quotidiennes. 78% de plus de 65 ans, seules ou sans enfants, sans équipements numériques.
  • Les distants (17%) : connaissance vague des avancées numériques mais aucun sentiment d’être concernés. Personnes jeunes (seulement 21% entre 35 et 64 ans), majoritairement des femmes, considérant les outils numériques comme des « gadgets » et peu équipées.
  • Les usagers (29%) : perception claire de tout ce que le numérique a changé dans leur vie mais déclarant pouvoir s’en passer. Personnes plutôt jeunes (34% ont moins de 65 ans), équipés avec des produits ayant fait leurs preuves.
  • Les homo numericus (34%) : « dépendance » assumée aux outils numériques. Personnes jeunes (48% ont moins de 35 ans), majoritairement des hommes de classes socio-culturelle et professionnelle supérieures, vivant avec des enfants (à 41%). Sentiment prégnant de confiance et de passion ; mais idée de prudence toujours présente.

Sans surprise, ceux qui bénéficient le plus d’Internet sont donc des hommes issus de catégories socio-professionnelles supérieures (les mêmes cadres trentenaires qui constituent le joueur de jeux vidéo type, par ailleurs), c’est-à-dire les populations les plus favorisées qui ont pu suivre avec aisance l’évolution des nouvelles technologies dès leur arrivée dans la vie citoyenne. En termes d’économie, en 2011 une étude de McKinsey & Co. établissait qu’Internet était responsable de 25% des créations d’emplois et d’augmentation du PIB français, ayant également permis la croissance fulgurante de certaines PME : un euro investi dans les outils numériques rapporterait deux euros de marge opérationnelle. Internet aurait également un impact positif sur le bien-être des citoyens : « accélération de la recherche d’emploi, meilleure qualité de soins, démocratisation du savoir, simplification de la vie quotidienne, établissement de nouveaux liens sociaux via les réseaux communautaires… ». La « simplification de la vie quotidienne » des internautes signifiant nécessairement, à moyen terme, la complication de celle des non-internautes (certains formulaires administratifs ne sont désormais plus disponibles qu’en ligne, de même que certaines structures culturelles ne mettent plus leur programmation que sur les réseaux sociaux, etc.), les problématiques de marginalisation et d’isolement des publics non connectés sont aisément envisageables.

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Carte de la connectivité dans le monde

Bien que ces inégalités d’accès se réduisent avec les années (et notamment avec la volonté gouvernementale que tout le territoire français ait accès au haut débit d’ici fin 2016), les non-internautes sont encore plus en décalage avec le reste de la société.  Parmi ces non-internautes, les caractéristiques identifiées montrent clairement l’opposition radicale entre eux et lesdits homo numericus : 90% n’ont pas le Bac et 44% gagnent moins de 1500€ par mois au sein de leur foyer. Encore aujourd’hui, Internet et ses technologies restent ainsi réservées aux citadins culturellement, socialement et financièrement avantagés, les victimes les plus significatives de la fracture numérique n’étant pas forcément les personnes âgées.

A noter : les mêmes inégalités se ressentent à l’échelle mondiale. Alors que les espoirs premiers étaient qu’Internet permette aux pays en développement de rattraper leur retard sur les nations les plus riches, l’écart s’est en fait très vite approfondi et aujourd’hui, l’Afrique est particulièrement lésée.


Les natifs d’Internet : générations Y et Z

Si les termes de génération Y et Z proviennent d’études sociologiques occidentales sur les générations, il semble qu’ils aient ensuite surtout été utilisés par les entreprises dans le but de mieux comprendre ces nouvelles recrues potentielles dont les ambitions, les attentes et les besoins diffèrent profondément des précédentes. Nous allons tenter d’éclaircir ces deux « concepts », tout en nous rappelant que définir des catégories de population si larges implique nécessairement de faire des généralités et autres stéréotypes, qui sont donc loin d’être toujours vérifiables.

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On parle de « digital natives »

La génération Y est la première génération à avoir connu très tôt Internet et la mondialisation. Certains la considèrent comme issue du début des années 1980 au milieu des années 1990, d’autres la décalent quelque peu en la faisant apparaître du milieu des années 1980 à la fin des années 1990. « Y » peut désigner, au choix, le croisement des fils du baladeur sur le torse de cette génération tout le temps branchée, ou la prononciation de la lettre anglo-saxonne, qui équivaut au mot « why » – « pourquoi ». Cela renverrait à leurs questionnements de l’ordre établi, de la hiérarchie classique etc. : grâce à leur accès permanent aux informations internationales, on les dit plus ouverts sur le monde que leurs aînés, conscients des enjeux écologiques et sociaux de leur temps, et donc moins enclins à accepter une autorité toute puissante sans la remettre en question. Comme toute génération, elle doit avant tout se définir par son contexte : c’est en comprenant le monde dans lequel elle grandit (un monde connecté, sans guerre mais avec le SIDA et des menaces écologiques de plus en plus nombreuses) que l’on peut envisager les traits communs d’une telle quantité de population.

 La génération Z désigne les jeunes nés aux alentours de 1995 ou après 2000 (selon où l’on fait commencer et s’arrêter la génération Y). N’ayant pas connu le monde sans Internet, une partie d’entre eux a quasiment grandi smartphone en main et dès l’adolescence, on ne peut plus le leur enlever – ce qui, grâce à leurs cerveaux multitâches, n’est pas une barrière à leur travail ou leurs activités quotidiennes, bien que cela soit difficilement compréhensible pour leurs aînés. « Z », peut-être pour zapping, pour l’idée de fin définitive d’une époque donnée ou simplement pour respecter l’ordre alphabétique pré-établi. Aussi nommée génération C (pour Communication, Collaboration, Connexion et Créativité), Internet et ses outils l’ont habituée au partage et à l’organisation horizontale : avec la viralité des blogs, des chaînes Youtube et autres espaces numériques personnels, l’accent est mis sur l’individualité tout autant que sur le collaboratif et la complémentarité des forces de chacun. Pour eux, le monde est un monde en crise d’où la stabilité professionnelle est presque totalement absente ; il faut donc multiplier ses compétences. La génération Z semble ainsi être celle du Do It Yourself,  des autodidactes et des auto entrepreneurs.


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